Le syndrôme de Noé ou le besoin irrépressible de sauver les animaux

Au fil des mes consultations, je me retrouve de plus en plus régulièrement confrontée à des troubles du comportement dans des foyers où vivent un nombre important d’animaux de compagnie, souvent de différentes espèces. Sans en arriver à des cas extrêmes, il faut rester vigilant afin que la “bien-traitance” ne bascule pas dans la maltraitance involontaire en ne respectant plus les besoins essentiels de chaque animal présent au foyer.

Le syndrome de Noé, qu’est-ce que c’est ?

Le syndrome de Noé, appelé en anglais animal hoarding (« accumulation d’animaux »), est un trouble compulsif qui consiste à posséder trop d’animaux de compagnie. Plus exactement, on possède plus d’animaux que l’on en peut en héberger, nourrir et soigner correctement et dans le même temps, on dénie cette incapacité. Les personnes sont vraiment attachées à leurs animaux et n’envisagent pas de s’en séparer. Le plus souvent ils ne veulent pas admettre qu’ils les font souffrir. Cette maladie atteint plus particulièrement les femmes, d’autant plus quand elles sont âgées de plus de 60 ans et vivent seules. (adapté de Wikipédia)

Comment en arrive-t-on là ?

Qui n’a pas été attristé par l’histoire de ce chaton retrouvé dans une poubelle, de ce chiot abandonné attaché à un arbre dans une forêt, de ce lapinou déposé dans un carton devant la porte d’un refuge, de cet oiseau handicapé à qui on a coupé les plumes, … ?
Amoureux des animaux, nous avons tous été touchés par ce type de récits, les réseaux sociaux en regorgent (à bon ou mauvais escient…), et il y a toujours un moment où nous nous sommes posés la question “Et si on sauvait ce pauvre malheureux ?”
Pour certains, c’est irrépressible et sans fin. Ces sauvetages frénétiques servant souvent inconsciemment à combler des traumatismes personnels, des manques affectifs, des expériences de vie douloureuses, la solitude, etc, ils leur est insupportable de voir des animaux abandonnés, maltraités et ils pensent que eux-seuls peuvent les sauver ! Et là, c’est l’escalade…
Leurs intentions de base sont toujours louables car se sont des amoureux inconditionnels des animaux, mais ce syndrome leur fait perdre de vue les questions essentielles : – Ai-je le temps de m’occuper d’autant d’animaux ? – Ai-je assez de place pour accueillir autant d’animaux ? – Toutes ces espèces sont-elles faites pour vivre ensemble ? – Les besoins primaires de chaque animal sont-ils respectés ? – Ai-je les moyens de nourrir, soigner tous ces animaux ? et tant d’autres questions primordiales pour le bien-être de tous.

Les conséquences liés à ce syndrome

  • Pour les animaux :

Les conséquences sont non négligeables et mènent le plus souvent à une grande détresse animale. Troubles du comportement, manque de soin, malnutrition, etc…
  • Pour les humains :

Les personnes atteintes du syndrome de Noé se retrouvent très rapidement totalement dépassées par la situation. Manque de moyens financiers, insalubrité, manque d’hygiène, etc.

Alors que faire face à ce syndrome ?

Bien heureusement, ce syndrome en tant que tel est très rare. Les personnes atteintes doivent être prises en charge. Leur retirer les animaux est une évidence, mais sans soins, la personne recommencera à coup sûr !
Même s’il est rare de rencontrer des personnes atteintes de ce syndrome, il faut néanmoins rester vigilant. Sans que le mal soit compulsif, la présence d’un nombre trop important d’animaux et/ou d’espèces sous le même toit peut engendrer des troubles du comportement chez chacun d’entre eux. C’est l’effet pervers de l’amour inconditionnel des animaux qui prend alors le pas.
Sauver un animal OUI, mais n’oublions pas de nous poser toujours LA bonne question : Sommes-nous en mesure de répondre à SES besoins pour qu’il se sente bien ?
Ch’Amicalement

Delphine Picchiottino, comportementaliste félin https://www.comportementalistechats.com/